Résumé:
Lorsque la Tolérance des Religions sort des presses de Hollande, le protestantisme français est à l’agonie. Ce traité est le fruit d’une réaction désespérée de la part d’un huguenot, Henri Basnage de Beauval (1656-1710), qui s’inquiète pour l’avenir de sa communauté confessionnelle. Il y dénonce les persécutions orchestrées par une Église catholique corrompue et rebelle à l’autorité légitime des Bourbons sur la Couronne de France. Ce texte est aussi un appel, de la part d’un protestant profondément attaché à la monarchie absolue, au « bon vouloir » de Louis XIV. L’auteur réclame en effet la mise en place d’une tolérance civile qui, selon lui, est nécessaire à la préservation de la paix dans le royaume et à « l’émulation positive des religions concurrentes ». Cette tolérance des plus pragmatiques n’est autre qu’un retour à l’édit de Nantes des origines, purifié de toute interprétation rigoriste. Son application devrait contribuer à la gloire du Roi-Soleil en Europe, l’érigeant en monarque soucieux du bonheur de ses sujets. Le sieur de Beauval justifie cette demande par l’idée que les huguenots sont de bons chrétiens mais surtout de bons français qui méritent d’être récompensés pour leur loyauté. Si ce traité est le premier d’un ensemble de textes dédiés à la tolérance qui apparaissent dans le sillage de l’édit de Fontainebleau de 1685, il ne peut être considéré comme complètement innovant. Il construit effectivement sa théorie à partir de ses propres lectures de théologiens protestants aussi bien que catholiques. Influencé par des auteurs comme Castellion, Locke ou encore Bayle, il propose cependant des arguments originaux qui, à leur tour, sont pris en compte par d’autres théoriciens de la tolérance.
Référence:
Sara GRAVELEAU, « La Tolérance des religions de Henri Basnage de Beauval (1684) », Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest, 2018/1 (n° 125-1), p. 45-57.